La Californie de A à Z : A comme arrivée.

Premiers pas d’expatriés

Chers tous,

3h d’attente à l’aéroport, les yeux rougis de larmes

11h de vol, dont pour Louise :

5h d’affilée à  jouer avec des écouteurs, à les brancher/ débrancher (on songe à contacter le Guiness[1])

4h à dormir

1h à regarder des dessins animés

1h à regarder par le hublot et manger.

2h pour passer les formalités douanières, récupérer les valises puis la voiture

45 minutes pour rejoindre la maison.

Après une odyssée de près de 30h, nous voilà enfin arrivés à bon port. Les formalités douanières ont été assez rapides. « Hello, I’m a teacher » était la phrase clé que je devais dire, en souriant m’a-t-on précisé, une fois arrivée face au custom officer. La douanière prend nos papiers, regarde mon visa J1 (échange culturel), le Graal pour pouvoir enseigner aux Etats-Unis puis me demande le laissez-passer A38 (en réalité le DS-2019) que nous trimballons avec nous comme une relique sacrée depuis notre passage à l’Ambassade américaine, il y a des mois de cela. C’est un papier délivré par notre sponsor. Sans ce formulaire dûment rempli et tamponné, le visa J1 n’est rien. Une photo, une prise d’empreinte (Louise râle parce qu’elle aurait voulu elle aussi déposer ses empreintes) et nous sommes admis sur le sol américain.

On récupère nos valises, on choisit une voiture et on file dans la nuit, sur l’Interstate 100. Direction, le Nord.

Les paysages défilent par la fenêtre tandis que la voiture remonte l’autoroute, à 50 miles/h. La lumière décline doucement quand nous arrivons en vue de San Francisco. Les gratte-ciels de Downtown s’illuminent et la prodigieuse image de la ville qui s’étend sous nos yeux nous ramène 5 ans en arrière, alors que nous achevions notre tour du monde. Que de souvenirs. C’est incroyable d’être revenus là, mais avec un passager supplémentaire dont nous n’envisagions alors pas encore l’existence. Louise regarde, ébahie, les gratte-ciels s’étirer dans la nuit noire et toucher les étoiles. Il est près de 21h et la ville est en effervescence. Les restaurants se remplissent et à chaque intersection, de nombreux piétons attendent pour traverser. On se remplit les yeux de ces lumières, ces images, ces sons. On a envie de s’arrêter à chaque rue, mais il se fait tard et le voyage a été long. On tourne à droite, à gauche, puis le GPS que je tiens fébrilement dans la main nous intime de continuer tout droit sur… 30km, jusqu’à la maison. On quitte les gratte-ciel et une vision fantastique s’offre à nous. Il est là. Celui dont on parle depuis des mois. Le point de repère de Louise. Celui sur lequel elle pense que nous allons nous installer. Son profil se découpe fièrement dans la nuit noire, tout auréolé de brume et de lumière. Des câbles sans fin s’étirent et se perdent dans l’obscurité. D’un rouge (en réalité orange, comme me le rappelle une petite voix derrière moi) flamboyant, presque doré il illumine la nuit et nos cœurs en même temps. Une vision fantasmagorique, mystérieuse et féérique à la fois. Voilà, on y est. C’est le Golden Gate. On esquisse un sourire. Puis on crie « youpi » et on applaudit. La petite est ravie. Et nous aussi, il faut bien le dire.

Passé le pont, on plonge dans la nuit noire et l’on croit deviner des étendues d’eau, des montagnes et des forêts. On a hâte de tout découvrir à la lumière du jour. On trouve sans encombre notre maison.

On habitera au numéro 21 d’une petite impasse, au nord de San Rafael. Le verrou résiste, on est fébriles. Enfin, après trois tentatives un peu stressantes (je me demande déjà où est l’hôtel le plus proche), on parvient à entrer. Une fois la lumière allumée, on constate l’ampleur de notre aubaine : notre nouvel appartement, de 80m², est intégralement meublé. Et avec goût. Les lits sont faits, il y a des pâtes et de la sauce tomate dans le placard, de l’eau chaude, l’électricité, le wifi. Et même un citronnier et un arbre à combavas dans la cour. On a juste à mettre nos affaires dans les armoires. Nathalie, la propriétaire a été plus que prévenante et on a l’impression d’être accueillis comme des rois : tout est au carré, le mot de passe wifi nous a été envoyé, du tulle rose orne le lit de Louise pour lui faire un lit de princesse, une carte lui souhaite la bienvenue, des petits calepins et des feutres sont laissés à son attention sur le bureau. Dans l’armoire, trône un petit cadeau de la part de Marie, Matthieu, Elise et Baptiste, nos amis qui habitent à 15min de là. Louise est ravie et son nouveau compagnon d’aventure s’appellera Rafael. Il est 22h heure locale (donc 7h du matin dans nos corps) quand on décide de se faire quelques petites pâtes avant d’aller se coucher. On ne se réveillera qu’à 6h30 le lendemain, frais comme des laitues.

L’heure est aux démarches. On fait nos premières courses (et on se fait rincer le porte-monnaie d’ailleurs), on envoie les premiers mails pour signaler notre présence sur le sol américain. Il faudra ensuite : se rendre au bureau de la sécurité sociale américaine pour être enregistrée et obtenir un numéro (et accessoirement être payée) / se rendre à un bureau dans le centre de SF pour donner mes empreintes digitales / aller chercher une carte prépayée pour nos téléphones / aller à la banque pour ouvrir un compte /aller au bureau du DMV (department of motor vehicles) pour passer le code et le permis…

Notre premier jour (le 10) s’achève sur un coup de tête. Et si on allait voir le pont ? On saute dans la voiture, il y en a pour 20 min. Juste avant le péage, on bifurque à droite et on gravit les hauteurs, jusqu’à Battery Spencer. Il y a des chemins de trail partout. On se voit déjà randonner et Guy s’imagine déjà grimper la montagne en vélo, ovationné par une foule en délire. Il doit faire 20° mais les gens sont totalement encapuchonnés. On ne va pas tarder à savoir pourquoi. Avec nos petits shorts, nos t-shirt, on a vite fait de se rendre compte qu’il fait un froid de gueux dû à un genre de vent à décorner les bœufs, totalement multilatéral (sic) et glacé. On court pour se réchauffer et une fois arrivés en haut, on est saisis devant la beauté du pont. Cette structure est absolument unique et cette couleur, inclassable. On reste quelques instants à contempler notre nouveau terrain de jeu. San Francisco est dans la brume et les maisonnettes accrochées aux collines semblent suspendues dans les airs. Des plages battues par les vagues, le profil effilé des gratte-ciels de downtown, un énorme porte conteneur et au loin, Alcatraz. En fait, on a du mal à réaliser que c’est là que nous allons vivre maintenant.

Retour au concret. Aujourd’hui, le 11 août, nous sommes allés à la douane. Cela a été rocambolesque. On a d’abord appelé United Cargo, pour nous entendre dire que si nous voulions récupérer nos malles, il allait falloir payer et faire appel à un custom broker (un courtier) qui négocierait pour nous les coûts prohibitifs. Bon. Super, on n’était pas au courant. Je m’entends encore dire à la dame au téléphone « mais… comment on contacte un broker ? » et elle de me répondre « bein… vous allez sur Google. Allez, have a nice day » (démerde toi en gros). Nous voilà partis à appeler à l’aveuglette des brokers. Le premier n’articule pas et on ne comprend strictement rien à ce qu’il dit. On zappe. Le deuxième nous donne un autre numéro à contacter. Un certain Manfred va s’occuper de nous. Alors on appelle Manfred  mais c’est une voix de femme qui décroche. Je lui explique brièvement la situation et me dit qu’elle me passe Manfred. Une espèce de voix de papy asiatique prend la suite. Aïe. C’est mal parti, il a l’air à côté de ses pompes. On galère et on commence à suer à grosses gouttes. Le sentiment que nous ne verrons jamais nos malles s’installe franchement. Et finalement, ce petit Manfred a de la ressource. Il me demande quels biens on transporte et si tout est usagé. « Oui oui, on a tout acheté en France il y a plus d’un an » lui dis-je. « Bon et bien, je vais être honnête avec vous » me dit-il. « Ces biens peuvent entrer gratuitement sur le sol américain. Je ne vais pas vous prendre votre argent pour une démarche que vous pouvez faire vous-même ». Et il me donne l’adresse des douanes et du lieu de stockage où aller chercher nos affaires. On file donc à la douane. Celle-ci nous dit que non, il faut d’abord aller au lieu de stockage pour obtenir un « release form ». Alors on va au lieu de stockage, on obtient le formulaire. On retourne à la douane, elle enregistre tout et nous délivre un autre formulaire avec lequel on retourne une fois de plus au lieu de stockage. Évidemment, tout cela est distant de 2 ou 3 kilomètres. Donc à chaque fois, on reprend la voiture, on attache Louise, puis on la détache, on lui remet sa veste, on attend pour la remettre une énième fois dans la voiture. 2h plus tard, les papiers sont en règle, la petite a arrosé le parking (bein oui évidemment, il n’y a pas de toilettes) et on peut venir chercher les malles le lendemain. On a tout de même été soulagés de 50$ au passage. Pour la forme.

Il est déjà presque 12h quand on quitte l’aéroport et on décide de commencer à profiter du cadeau fait par mes collègues du lycée Emilie du Châtelet : une énorme somme en liquide pour se faire plaisir. Notre première entame de cette somme ira a… Lori’s Diner. Ce fantastique diner où nous avions mangé un soir de nouvel an il y a 5 ans. Le hasard fait que nous nous retrouvons assis exactement à la même table (le retour vers le passé, c’est ici). On immortalise l’instant, avant que Louise ne se jette sur son hot-dog et nous sur nos burgers et frites de patates douces.

Je sais ce que vous vous dites.  A ce rythme-là, ils vont prendre 20kg. Vous avez tout à fait raison. Mais là, ce sont les vacances. Après, on mangera de la salade verte sans sauce. Si si.

On vous embrasse,

C, G & L

A suivre dans le prochain épisode : Elle ressemble à quoi cette maison ?

 

[1] J’avais prévu le pack divertissement : coloriages, gommettes, puzzle, histoires, légos, jeu de piste dans l’avion, exercices pour s’entrainer à la petite section de maternelle (Louise adore), doudous et même quelques petits dessins animés. Rien n’a servi… (non pas que je m’en plaigne) !

10 thoughts on “La Californie de A à Z : A comme arrivée.

  1. Quelle galère pour commencer votre nouvelle vie à SF mais tout ce termine bien c’est le principal. Bonnes vacances et profitez . Il ne reste plus beaucoup de jours avant ta rentrée. Gros bisous à vous 3

  2. Quelle galère pour commencer votre nouvelle vie à SF mais tout ce termine bien c’est le principal. Bonnes vacances et profitez . Il ne reste plus beaucoup de jours avant ta rentrée. Gros bisous à vous 3

  3. Les démarches bureaucratiques!!!! je crois que j’ai lu les mêmes casse-têtes à Papeete, non? C’est du pur Kafka. Content que vous soyez bien arrivés; bonne continuation. Georgette vous transmet ses amitiés, et bises pour Louise, of course. Kisses.

  4. Des frites de patates douces ? Mais pourquoi pas des buns sans gluten tant qu’on y est !

    PS : ça fait combien 50 miles/h en km/h ?

  5. C’est pas encore les vacances, mais ça y ressemble quand même (sans les démarches) ! En plus vous avez le décalage horaire dans le corps, même si vous n’y pensez pas! Courage, la reprise arrivera bien assez tôt ! Bisous à vous trois !

  6. Je n’ai vu que deux drapeaux américains sur ce post, c’est trop peu 😉

    Que cela doit-être troublant d’arriver dans une maison à l’étranger qui ne sera pas une maison louée pour les vacances, avec une date retour en tête, mais qui sera son nouveau chez-soi. Tout doit être confus dans vos têtes, non, à ce moment-là ? Surtout que vous n’avez pas choisi la déco, ni l’ameublement. Petit à petit les repères seront pris et ce chemin-là que vous prenez pour la première fois sera celui des courses et celui-ci du retour de la balade à vélo. Bref, vous vous construisez votre « espace proche » (old chapitre de 6e de géographie – tu y échappes, c’est dommage, il avait des attraits non négligeables).

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