Chers tous,

Il faut que je vous raconte tout de même. Comme vous le savez, le marché de la location est très très complexe ici. Des loyers qui flambent pour des logements qui ne sont pas toujours ultra nombreux et une demande incroyable. Quand je suis tombée sur l’annonce pour un petit appartement à 2900$ dans le cœur de Sausalito, j’ai immédiatement bondi sur mon téléphone. Stressée une fois de plus à la perspective de ne rien trouver avant la date fatidique, j’ai tout de suite contacté Nancy, l’agent en charge de la location. Il faut être très rapide (l’annonce avait été postée il y avait à peine 2h) et… sortir du lot. J’ai donc envoyé un premier SMS avec (exercice compliqué), en 200 caractères une petite présentation de nous (on est super sympas, une petite famille française discrète, respectueuse, sans animaux et non fumeurs avec une lettre de recommandation incroyable de notre propriétaire actuelle), se terminant par la question essentielle : quand peut-on visiter ? J’ai écrit un jeudi et j’ai eu rendez-vous le lendemain à 13h. Pas l’heure la plus simple et Guy travaille mais… Lucie n’a alors que 2 semaines et se case sous un bras sans souci pour aller visiter au plus vite. A l’arrivée c’est la douche froide : des concurrents d’autres personnes visitent également l’appartement et sont arrivées avant moi. On entre tous. L’appartement n’est pas très grand et se visite vite. Mes concurrents L’autre couple accapare l’agent mais visite rapidement et quitte les lieux. L’appartement est simple, de petite taille certes, mais refait à neuf. Et la vue est incroyable. Je le veux. Je me rappelle qu’il faut alors, m’a t-on dit, se démarquer et sortir le grand jeu. Une connaissance me disait « Fonce si tu le veux cet appart. Il faut y aller au culot ! Elle est d’où la proprio ? Marocaine ? Fais lui un Tajine ! Les américains adorent ça ». Bon c’est peut-être un peu exagéré certes mais je prends le conseil au pied de la lettre. Je profite du départ de l’autre couple pour sortir l’artillerie lourde : « Je veux cet appartement Nancy. Il me le faut. Vous avez vu la petite Lucie ? Oui elle a deux semaines… elle est belle hein ? (et Nancy , californienne peroxydée de la petite cinquantaine, de fondre devant le cosy). Vous savez on vit trop loin c’est terrible. Surtout avec deux enfants (j’essaie de dégainer une larme, mais ça ne vient pas). On ne peut plus passer de temps avec elles. 45mn de trajet retour parfois. Ce n’est plus possible. On peut rencontrer la propriétaire ? Il faut lui dire qu’on est super sympa. Et puis de toute manière au 1er Aout, notre propriétaire revient. On va être à la porte. Je peux écrire une lettre à la propriétaire de cet appartement ? Comme ça je vais lui dire moi même qu’on est sympas  et lui raconter ma vie nous présenter.  D’accord je vais lui écrire. Oh là là Nancy cet appartement serait tellement bien pour nous. On a tout les papiers qu’il faut. Alors non (aïe je ne m’attendais pas à cette question), on a pas de credit score* (*ici, on loue pas mal sur la base de la solvabilité des gens. Tout le monde a une carte de crédit et doit avoir un bon credit score montrant sa capacité à ne pas avoir de dettes, à être bons payeurs). Mais on a une super lettre de recommandation de notre propriétaire actuelle (en fait non, mais je vais lui en demander une vite vite vite). Dites Nancy, on a une chance quand même vous croyez ? » J’insiste une dernière fois en expliquant qu’on est faits pour cet appartements puis demande quand mon mari pourra venir visiter. Rendez-vous mardi. Bref. On se serre la main et elle me laisse un espoir que cela puisse marcher. En partant je croise une autre concurrente personne qui vient visiter. Aïe. Pas de credit score, des petits salaires… ce n’est pas gagné pour nous.

Dans le week-end, Nathalie (notre adorable propriétaire actuelle) nous envoie une lettre de recommandation à tomber par terre et je tape un courrier à l’intention de Brenda, notre éventuelle future propriétaire. De quel acabit ce courrier ? Et bien j’ai décidé de lui raconter notre vie (les américains adorent ça). Notre rencontre il y a 18 ans, nos voyages, notre tour du monde, l’arrivée de Louise, puis des voyages de nouveau, le départ pour San Francisco et l’arrivée surprise de Lucie dans notre pays d’adoption temporaire. Et puis le stress des derniers mois, les appartements peu nombreux, les temps de trajet incroyables, les prix fous etc… Bref j’envoie des paillettes et des pétales de roses et quelques bouffées de stress également. Une jolie lettre assortie de quelques photographies, histoire de la prendre par les sentiments. Guy visite l’appartement qui lui plaît bien, je remets mes lettres en mains propres à Nancy  puis on croise les doigts. Le soir même, elle me dit avoir envoyé la lettre à Brenda et celle-ci a fait mouche ! Elle nous veut comme locataires ! Incroyable ! On ne débouche pas pour autant le champagne… il faut « postuler » en ligne sur un logiciel dédié dans lequel on entre nos coordonnées, nos salaires, nos revenus autres, nos dépenses etc. Après 2 jours d’attente interminables, on apprend que tout a été validé. Le contrat nous est envoyé et la cerise sur le gâteau ? Je harcèle un peu Nancy – en lui promettant de ne pas venir dormir avant le début du contrat –  pour récupérer les clés plus tôt afin de commencer à y mettre des meubles. Nous avons récupéré les clés il y a 1 semaine.

Entre temps, j’avais repéré et essayé un canapé-lit super confortable gratuit chez Sophia, une néerlandaise qui s’en sépare à regret , trop grand pour son futur appartement. Gratuit, il nous plaît, on le prend. Chez Mathilde, une française qui retourne dans le sud de la France mardi prochain, j’avais repéré, outre des ustensiles de cuisine, un lit complet : matelas, sommier, couettes, draps, oreillers. Dur dur de trouver du gratuit en bon état et sans bêbêtes pour la literie. Chez Mathilde, c’est tout propre, tout rangé et tout soigné. Alors le lit de Mathilde est payant. Elle nous demande 200$ et après négociation (en deux SMS : Mathilde, 200 c’est trop. 150 ça rentre dans notre budget ça irait ? ». « Ok »me répond-elle) on l’emporte pour 150. Je repère un autre meuble à 20$ non loin de chez nous. Pris par le temps, on a pas le temps de le récupérer et la propriétaire me dit qu’elle a déménagé et qu’elle l’a laissé sur le trottoir il y a plusieurs jours déjà. Guy y va « au cas où » et trouve le meuble toujours au même endroit. Bon bein du coup il est devenu gratuit. Avec tout ça, il va nous falloir un camion. Guy se charge de la location, coordonne 2 amis et modifie son planning Decathlon en échangeant son shift avec ses collègues. Moi, je passe ma semaine à coordonner Mathilde, Sophia et tout le reste. Tout le monde est ok pour samedi matin.

Alors le week-end dernier, aidé de deux amis (dont le fameux breton, papa de la petite Eloane), Guy a déménagé les meubles qui commençaient à sérieusement s’entasser dans le salon et la petite cour. On offre une tournée de pizza, 14h sonne déjà, Guy enfourche son vélo et part pour son shift à Decathlon (du coup, il a travaillé jusqu’à 20h). Pfiu. Quelle semaine ! On a encore eu une semaine pour ramasser ici tous les petits morceaux de vie que nous avons essaimés pendant 11 mois. Les photos, les dessins collés au mur, les livres disséminés aux quatre vents, les petites choses qu’on a accumulé çà et là, les tonnes de vêtements des filles. Il faut réparer 2 ou 3 bêtises (Louise a fait tomber une barre de douche dans « le bloc douche ». Il faut la remplacer), vider les placards, retaper les coussins du canapé,  faire le tri entre nos objets et ceux de Nathalie que 11 mois de vie ici nous ont fait nous approprier tout doucement.

Cela nous fait tout de même drôle de quitter ce petit coin de Terra Linda. On s’est habitués et ces murs nous sont devenus plus que familiers. C’est avec un petit pincement au cœur (vous me connaissez) que je repense à nos premiers posts sur le blog il y a 1 an. Je vous contais alors le petit coin de paradis que nous découvrions et où nous allions nous installer pour un an.

Hier (samedi), après avoir acheté des paniers en osier à une petite mamie à Novato pour une somme dérisoire, j’ai fait l’aller-retour jusqu’à Ikea Emeryville, de l’autre côté de la Baie (autant vous dire qu’il faut dégainer sa croix et une bannière : c’est une véritable croisade). Toute la semaine, nous avions empaqueté régulièrement dans nos 5 cartons (on en a pas plus alors on a fait un aller/retour par jour) toutes nos affaires, vidant progressivement les placards. Et aujourd’hui, dimanche, nous avons déménagé l’essentiel, le primordial : le lit de Louise ! Voilà, le pas est franchi. Nous vivons désormais à Sausalito. Et chaque matin au petit déjeuner,  nous aurons droit à cette jolie vue sur la Baie et le Mont Tam. 

Jolie vue ? Où ça le Mont Tam ? Et puis qu’est-ce que c’est que cette lumière jaunâtre ? Non, je n’ai abusé d’aucun filtre… un énorme feu fait rage dans Yolo County au Nord de chez nous et la Baie est toute entière est noyée sous un épais nuage de cendres. De San Rafael, l’effet était impressionnant ce matin. Que l’on regarde d’un côté ou de l’autre de la rue, la couleur du ciel était totalement différente.

Quant à nous, pour l’instant, l’appartement est « brut » de décoffrage. Des meubles posés à la va-vite un peu partout, pas de déco, des tonnes de vaisselle dans les placards qu’il faut encore laver (tout a été récupéré aux 4 coins de San Francisco), pas de table (à nous le pique nique!) et beaucoup de nettoyage et de rangement à faire. Et puis nous allons enfin pouvoir reprendre le cours de nos pérégrinations.

On doit tout de même vous confier qu’entre le changement d’appartement, le changement  de ville et l’arrivée de Lucie … on a l’incroyable impression de vivre deux expatriations en une. A 3 dans le Nord. Et maintenant à 4 à côté du Pont. Deux expatriations en une. Et ça, ça nous fait plutôt plaisir.

A très vite pour la suite des aventures,

C, G, L&L

PS: Challenge perdu ! Nous avons récupéré un max gratuit mais…  on a pas été assez aventureux. On a pas voulu tenter le coup de l’occasion pour les serviettes de toilette, les oreillers, les poubelles et le … balais des toilettes. Et puis bon, on a trouvé des lampes, mais pas les ampoules. Des appareils électriques mais pas les rallonges, Bref, vous voyez le tableau. Mais avec 500 dollars de budget en tout et pour tout, on a été très raisonnables.

Quelques réponses à vos commentaires

@Jojo : Merci pour le tuyau ! Je ne connaissais pas du tout donnons.org… ma soeur s’y est précipitée d’ailleurs : )

@Evelyne : Merci Evelyne ! Le « fantôme derrière le drapeau »  comme tu dis a bien faire rire Louise ! On t’embrasse fort !

@Colette: Merci Colette ! Je ne sais pas si cet appartement est magnifique mais… on s’y sent plutôt bien ! Et puis vivre à Sausalito va drôlement nous changer la vie : )