Le mythe de l’Ouest

Avec 4 généreuses semaines de voyages dans l’Ouest américain, un road trip s’imposait. Au terme de deux semaines passées dans la Bay Area, nous avons donc fait nos sacs pour embarquer pour 12h de route. L’Utah nous avait laissé totalement émerveillé il y à deux ans. Nous avions été époustouflés par les couleurs, les formations géologiques, l’Histoire. Une atmosphère tout à fait unique. Y retourner pour en voir plus était une évidence. On reprend donc la traversée des vastes plaines monotones qui nous conduisent du côté de la détestée zone de Bakersfield avant de débuter la traversée du désert de Mojave, toujours aussi incroyable.

La chaleur est intense dans cette cuvette, plus de 106 degrés Farenheit. Une légère brume brouille l’horizon et les montagnes, comme en lévitation, ressemblent à des vaisseaux posés dans le désert. Pas une âme qui vive. Juste un vieux road diner sur le bas-coté de la route qui vend du Alien Jerky (de la viande séchée d’extraterrestre). La zone 51 n’est pourtant pas tout à côté. Le bord de la route est jonché d’éclat de pneus et mes vieux démons me reprennent « et si on devait tomber en panne ici, on ferait comment ? ». Les paysages aux profils vertigineux sont à la fois fascinants et terrifiants. « Est-ce qu’on a assez d’eau au cas-où ? On devrait peut-être couper la clim’ pour préserver le moteur et éviter qu’il ne chauffe ? ». On s’engage dans une longue route droite encadrée de buissons bas, secs et rachitiques. Et puis progressivement alors qu’on laisse avec plaisir Las Vegas et le Nevada derrière nous, on entre en Arizona et les pierres rougissent, les plaines jusque là stériles se parent de vert sous un ciel d’un bleu profond. Un camaïeu de couleurs s’offre à nos yeux. On navigue le long de la frontière entre l’Utah et l’Arizona et puis au coup de quelques centaines de miles, voici Kanab. Le Moab du Sud. Notre base de départ pour nos aventures dans le désert. Voici 6 endroits qui nous ont plus au cours de notre petite expédition.

Highlight #1 – Le Sahara au coeur de l’Utah
La carte indique qu’il y a des dunes de sable « rose corail » à 25mn de Kanab. Armés de notre appareil photo, et surtout de nos gourdes d’eau bien remplies, on se dirige vers ce petit State Park peu connu. Pas grand monde à l’entrée, on s’acquitte des 10$ de « day use » et on gare notre voiture au pied des dunes. Le paysage est fantastique et les filles – un peu grognons ce matin – sont finalement bluffées devant ce bac à sable géant. On a vite fait de se déchausser et de promener nos pieds avec bonheur dans ce sable d’une finesse incroyable. Les photographies malheureusement ne rendent que très mal la couleur de ce sable qui effectivement est rose poudré avec des nuances oranges. Résultat de l’érosion continue depuis des milliers d’années des vastes massifs de montagnes rouges qui encadrent toute la région. Les dunes s’étirent dans un espace très vaste – l’infini pour les filles. Il est 9h30 quand on arrive sur place, le sable est tiède et il n’y a presque personne. On saute, on glisse, on se jette et on grimpe la plus haute dune. De là-haut, le paysage est à couper le souffle. Une famille américaine avec 4 adolescentes, les parents et le chien viennent s’installer à côté de nous, chaussent des surfs et dévalent la pente – parfois avec quelques roulades – à toute vitesse. On s’amuse à les regarder descendre et surtout remonter les dizaines de mètres dans le sable. La mère nous propose de nous filmer pendant qu’on dévale à pied la pente. Le résultat est sympa. A la remontée, elle nous offre d’utiliser sa luge à sable. On s’installe dessus avec Louise puis Lucie et on dévale la pente à toute berzingue. C’est drôle mais il vaut mieux descendre bouche fermée, ce qui est une gageure ! On repasse le soir pour admirer le coucher de soleil sur la région.

Highlight #2 – Sur la trace des dinosaures
Comme dans tout l’Etat, le sud de l’Utah dispose également de nombreux sites où voir de véritables traces de pas de dinosaures. On avait adoré aller à la rencontre des Iguanodons à Moab, on ne se fait pas prier pour aller sur leurs traces du côté de Kanab. Les traces sont ici moins préservées et il faut les mériter. Une petite randonnée d’1h aller/retour nous emmène dans le fond d’un canyon rouge ocre. Plus un bruit, quelques lézards filent à notre approche, les cactus s’épanouissent et poussent comme des champignons et en suivant le cours de la rivière asséchée, on y arrive enfin. Deux traces sont encore visibles, fortement érodées tout de même. Peu importe, l’émotion est la même. On profite tout de même du coin pour grimper quelques rochers mais l’endroit ne se prête pas vraiment au bouldering : la plupart des roches sont en fait extrêmement friables et les prises ne tiennent pas. On se retrouve très vite avec des poignées de sable dans les mains et on comprend d’un coup d’un seul d’où provient tout le sable des Coral Pink sand dunes.

Highlight #3 – Les canyons de Hollywood
On ne le savait pas mais de très nombreux films ont été tournés dans le coin. Il faut dire que les chaînes de montagnes tantôt rouges ou blanches sont photogéniques ! Au fond du Johnson Canyon on tombe sur des vagues de pierre que l’on s’empresse de grimper et de surfer tandis que dans les hauteurs de Kanab, d’énormes grottes offrent de superbes points de vue sur toute la vallée. A Kanab, ont été rassemblés de nombreux décors qui ont servi pour tourner des Westerns hollywoodiens dans les années 70. Les filles ne se font pas prier et rejouent La petite maison dans la prairie et Guy se glisse dans la peau de Clint Eastwood.

Highlight #4 – Champignons en kodachrome
A proximité de notre maison se trouvent deux zones caractéristiques du coin : Les Toadstools et Old Paria et ses couleurs absolument démentes. Les Toadstools se trouvent au bout d’une randonnée assez courte de 2 miles mais par cette chaleur (près de 38°) marcher plus longtemps n’est pas envisageable. On part avec des litres d’eau et on s’arrête à chaque zone d’ombre. Le spectacle final vaut le déplacement. D’immenses pierres semblent délicatement posées en équilibre au sommet de formations géologiques que le temps affine progressivement. Tantôt rouges, tantôt blanches elles sont toutes différentes et fascinantes. L’occasion de faire un petit cours de géologie grandeur nature pour les filles. En se promenant sur le plateau qui abrite des extraordinaires champignons (toadstool), on à l’impression surréaliste de déambuler dans un tableau de Dali.

A quelques encablures de là, on visite notre premier petit Slot Canyon. La femme qui nous renseigne sur les petites randonnées à faire dans le coin nous dit que personne ne le connait ni le visite vraiment. Et pour cause, voici les indications qu’elle me donne pour le trouver : il faut rouler quelques miles sur une route en terre, puis après la deuxième ravine qui sert à évacuer l’eau de la rivière en cas d’inondation, il faut se garer à droite. Puis retourner vers la ravine et rentrer dedans puis marcher vers l’est pendant environs 3/4 miles puis après le gros caillou jaune et blanc, à côté de l’arbre mort, on trouvera le canyon. Bref. On comprend pourquoi personne ne va le visiter. On démarre mal puisqu’au bout de 3 min de marche, on tombe sur une rivière qui barre tout passage. On sort la boussole pour vérifier l’est puis on remonte le gulch dans l’autre sens sous un soleil de plomb. Évidemment vous imaginez bien que des arbres morts, on en trouve à la pelle, ainsi que des gros cailloux jaunes et blancs. On parvient malgré tout à trouver le fameux Slot Canyon qui ravit les filles qui y font… du toboggan et jouent à cache cache avec les perspectives.

Old Paria nous a été recommandé par de nombreuses personnes dans le coin. La réputation du site n’est pas usurpée. Les couleurs sont absolument incroyables et les contrastes saisissants. On prend une « dirt road » plutôt engageante en serrant un peu les dents tout de même. Les histoires de touristes restés enlisés sur des routes sur lesquelles les voitures de location ne sont pas autorisées sont légion dans le coin. Et avec le thermomètre qui flirte avec les 100°, une fois de plus on n’a pas vraiment envie de rester coincés. On prend renseignements auprès d’un ranger qui après avoir regardé notre voiture nous dit « you should be good« . Et en effet, c’est passé. Les couleurs sont fantastiques, à la limite de l’extravagance. La palette s’étire du rouge au jaune en passant par toutes les nuances de gris voire même de bleu. On est stupéfaits devant l’invraisemblable et inimaginable exubérance des teintes et des nuances. Un véritable feu d’artifice que l’on ne pensait pas possible. Un accident de crème solaire et de transpiration dont je vous passe les détails a malheureusement gâché quelques photographies mais Old Paria est de toute manière inoubliable…

Highlight #5 – The New Wave à Page
Il y a à 2h de route de Kanab une formation géologique unique au monde qui attire des touristes du monde entier. Celle-ci est tellement courue qu’il faut désormais un permis pour y aller et celui-ci n’est délivré qu’à 20 personnes par jour sur loterie – ce qui est un excellent moyen de protéger l’endroit. Si on ajoute à cela le fait qu’il faut un 4×4 pour accéder à la zone quelque peu isolée et que nous sommes 4, autant vous dire que nous n’avons même pas ne serait-ce que tenté d’obtenir un permis. Cette formation géologique splendide, c’est The Wave. Des ondulations de grès qui donnent le sentiment de voir une vague ciselée dans la pierre. C’est tout simplement à couper le souffle. En faisant quelques recherches, on découvre un autre endroit à quelques miles de chez nous qui ressemble – de loin certes – à cette fameuse vague. Elle a été nommée « The new wave ». C’est totalement isolé, à proximité de Page, Arizona. Cela nous fait un beau lot de consolation. Les filles adorent les ondulations : il faut dire que celles-ci sont particulièrement photogéniques. On ne reste malheureusement pas longtemps. Il n’y a que peu d’ombre et on est au-delà des 40° une fois de plus. A Page, on en profite pour – en lieu et place de notre pique-nique traditionnel – aller manger dans un Drive-In typiquement américain – Sonic. Il ne nous laisse pas une impression incroyable (si ce n’est que les filles ont adoré manger dans la voiture) et on file vers de nouvelles vagues : celles du Colorado.

En contrebas de Page, l’énorme barrage de Glen Canyon donne lieu à des vues grandioses sur le Colorado dans lequel on peut même se tremper les pieds. 41° degrés dans le cou mais 15 tout au plus au niveau des pieds. Contrastes garantis !

Highlight #6 – Le plus beau canyon du monde ?
A cause de la pandémie, les frontières sont donc fermées. Il n’y a plus de touristes si ce n’est des touristes américains… et nous. Résultat, Antelope Canyon qui a été jusque là inaccessible parce que submergé de demandes, s’offre à nous. Il m’est relativement difficile de décrire l’endroit, les mots manquent. Un slot canyon est un canyon qui se forme dans la fente d’une masse rocheuse. Celui-ci a entre 10 et 18 millions d’années et a été classé dans les années 1960. Il faut venir sur un créneau horaire particulier, aux alentours de 11h, quand le soleil n’est pas encore au zénith mais s’en approche. Les jeux de lumière dans le canyon sont alors paroxystiques et l’orangé naturel des parois éclate dans toute sa splendeur. On est subjugués et totalement sous le charme. Les formes tourbillonnantes des parois, le touché satiné et poudré des vagues, les reflets, les ondulations, les jeux d’ombre et de lumière sont inédits. Chaque tournant offre de nouvelles splendeurs. C’est une cathédrale de pierre qui charme le regard, enchante et conquière les esprits. En un mot, l’endroit est captivant. On ne peut y accéder seuls malheureusement. Antelope Canyon se trouve en territoire Navajo et ce sont les Indiens qui détiennent l’accès. On visite donc avec Lorie, très sympathique guide Navajo d’une soixantaine d’années qui prend le temps de nous expliquer la formation mais l’ensemble est chronométré. 1h30 pour admirer les 0,750 miles du canyon (un peu plus d’1km). A prendre ou à laisser.

1O miles plus à l’Est, se trouve le mythique Horseshoe bend. Une ondulation naturelle du Colorado dans lequel on est allés se tremper les pieds. Les parois sont vertigineuses et le bend est parfait. Un régal pour les yeux et l’esprit.

10 jours en Utah c’est à la fois énorme et peu. Des splendeurs partout où le regard se pose, des randonnées incroyables et des points de vue fabuleux. On serait bien restés encore pour emmagasiner un peu plus ces images féeriques et sublimes.

On passe encore quelques jours à San Francisco le temps de voir, revoir et … dire au revoir. Puis retour en France ! A bientôt pour la suite de nos aventures ailleurs dans le monde,

C, G, L&L

7 thoughts on “Le mythe de l’Ouest

  1. Coucou a vous 4. Quel plaisir de te lire c’est fantastique ce que vous avez vécu et vu et tes photos sont magnifiques. Je vous souhaite un bon retour . A très bientôt bisous

  2. Belles aventures minérales ! Quelle profusion de couleurs dans ces formations rocheuses dignes d’une palette de peintre, c’est merveilleux et magnifique ! À bientôt ! 😘

  3. Quelle virée fantastique! Mais vous avez du avoir bien chaud ! Ici en Bretagne on supporte bien la marinière! Ça doit donner envie de faire de la peinture tous ces paysages colorés ! Profitez des derniers jours bises

  4. Magnifique comme toujours ! Comme dirais un ancien chef d’état français : c’est beau, mais c’est loin T_T Je note ces endroits à visiter pour beaucoup plus tard !

  5. Un peu en retard mais superbe récit et photos!
    Antelope Canyon / Horse Shoe Bend, de beaux souvenirs de 2017 pour notre part, mais surtout vu vos goûts et vos photos vous feriez bien d’aller jeter un oeil à John Day Fossil Beds National Monument (Oregon) et Bisti Badlands (New Mexico) la prochaine fois!
    (Évidement vous privilégierez le NM pour venir nous voir 😉

  6. Une très jolie histoire agrémentée de très belles photos .. on va finir par se lasser 😉
    Au plaisir de vous relire à défaut de vous revoir .. bientôt peut-être …

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