Berlin sonne comme une évidence.

Ville repoussoir pendant des années. Puis ville lumière aujourd’hui.

Je passe en revue mentalement toutes les images de la ville. La porte de Brandebourg, le Mur, Kennedy, le pont aérien, Hans, Rostropovitch, les lapins.

Ville éclectique s’il en est, Berlin a beaucoup (beaucoup!) à offrir à qui a du temps à lui consacrer. Éclectique, déglinguée, reconstruite, poétique, historique, blessée, graphique, délaissée, bohème chic, académique, stroboscopique et même schizophrénique. C’est un peu de tout ça à la fois. On est là pour une semaine et on se rend déjà compte que ce ne sera pas suffisant.

Cette ville cristallise une grande partie de l’Histoire des relations internationales au XXe siècle. Coeur névralgique de la Guerre froide, vitrine de l’affrontement de deux modèles idéologiques diamétralement opposés, pas étonnant qu’elle ait suscité mon intérêt. À Berlin, dès notre arrivée, on saute à pieds joints dans l’Histoire et on la regarde en face, comme dans un miroir. Ce n’est pas la première fois que cela nous arrive (au Japon, en Chine, au Vietnam, au Pérou, en Russie, en Pologne, en Corée du Nord…) mais la sensation est chaque fois la même : fantastique.

Une succession de péripéties nous ont conduit à loger à proximité du quartier central (et touristique) de Berlin, Mitte. Nous avions trouvé un premier logement sur airbnb, annulé par Alcyone (notre logeuse) moins de 24h avant notre départ. Nous nous sommes lancés sur la réservation d’un deuxième logement, mais nos nombreux messages sont restés lettre morte. On se rabat donc 30min avant de prendre l’avion sur un dernier appartement, bien plus cher que les deux autres, dans le quartier des Granges, à deux pas de tout. Infortunés nous sommes, mais au centre de la ville nous serons !

Jour 1 

10km

16847 pas

8h

3 pizzas

2 macarons

Pour notre première journée, on a pas chômé. 10Km de randonnée urbaine nous ont emmenés dans les highlights de Mitte, le quartier central (et touristique) de Berlin. J’ai emmené dans mon sac quelques savoirs, quelques photos qui ponctueront inlassablement notre périple berlinois.

On démarre ainsi avec un premier aperçu du Reichstag depuis la pelouse un peu décrépie du parvis. Le temps pour moi de rappeler à mon auditoire (sic) quelques éléments de l’Histoire allemande et de se repasser le fil des évènements de la nuit du 27 février 1933 (Incendie du Reichstag), qui permettront à Hitler de faire interdire tous les partis politiques si ce n’est le NSDAP.

La route nous conduit très naturellement devant la Brandenburgen Tor (Porte de Brandebourg) et tandis que j’ajuste mes photos, on devise longuement sur le tracé du Mur : « ah non mais attend regarde la photo de Kennedy, Brandt et Adenauer le 27 juin 1963. Regarde la porte, elle est de dos : le mur passait là en fait »… On se positionne où il faut pour reprendre la photo (à peu près – on ne peut évidemment pas se mettre au milieu du carrefour) au même endroit.

En suivant le tracé du mur, on arrive naturellement sur le Mémorial de l’Holocauste, émouvante et impressionnante forêt de 2711 stèles allant de 1cm de hauteur à plus de 4m.

Aucune inscription, mais un mémorial labyrinthique (où perdre un petit individu se fait en un claquement de doigts) saisissant honorant la mémoire des millions de Juifs assassinés pendant la guerre. Ici, même la pierre semble pleurer.

Avant le déjeuner, on poursuit dans une étroite ruelle pour se retrouver face à un parking d’immeuble d’habitation. Plus rien ne subsiste ici du Bunker où le Fürher a passé ses derniers jours. Un panneau explicatif donne quelques explications, celui-ci ayant été totalement démantelé, renfloué et transformé en parking à la fin des années 50. Une dame me demande « où est le Bunker ? ». Elle semble déçue quand je lui apprends que celui-ci n’existe plus.

Après avoir rejoint l’Internationale de la pasta pour un copieux déjeuner, on se retrouve sur Postdamer Platz devant les pans du Mur.

C’est ici même que le 9 novembre 1989, résonnaient les premiers coups de pioche qui allaient aboutir à la chute du Mur. On fait une petite incursion dans Berlin Ouest pour découvrir un autre visage de la capitale : moderne, audacieuse et « haute » !

Puis on retourne à Berlin Est. Un large pan de mur plutôt bien conservé barre la vue sur le quartier que nous venons de quitter et on prend physiquement conscience de la séparation. La célèbre photo d’Henri Cartier Bresson prend alors tout son sens.

Tandis que l’on prend le temps de l’observer, le Mur laisse tantôt (aperçe)voir la vie « derrière » et sert parfois de rideau de scène pour un spectacle incongru…

A quelques mètres de là, Checkpoint Charlie nous tend les bras. On nous avait prévenu et nous le savions mais le voir nous désole un peu quand même : Charlie est devenue une usine touristique où tout est bon pour délester le badaud de quelques deniers.

Faire tamponner son passeport « comme avant », se prendre en photo avec un soldat. Même Mac Donald tire parti de la situation. Pour le coup, ça nous fait plutôt rire… C’est ici que le 27 octobre 1961, les chars soviétiques s’opposent frontalement aux tanks américains lors d’un de ces épisodes de tension dont la Guerre Froide avait le secret.

Tandis que le soleil décline et que la lumière teint les bâtiments en ocre et miel, on termine la journée sur le Gendarmenmarkt pour admirer le Dôme des Français.

Il est déjà temps de rentrer « chez la dame », dans notre quartier où on entend plus de russe que d’allemand, derrière notre porte cochère couverte de graffitis, au 156 Torstrasse.

A très vite pour la suite,

C, G & L