RetrouvailleS

San Francisco Airport –  1er dimanche des vacances : les copines débarquent.

C’est avec joie non dissimulée que Matthieu et moi même nous rendons à l’aéroport, rencontrer Corinne, San Franciscaine depuis 20 ans qui vient elle aussi accueillir nos amies communes venues de France : Anne-Gaëlle, Josiane et Marie-Hélène. Collègues du lycée jadis, nous sommes devenus amis il y a déjà quelques années. Voir leurs bouilles à l’aéroport est un sentiment incomparable. Elles dorment chez Corinne dans le Sud de la ville, aussi, on en embarque 2 d’entre elles et on file sur la 101.

Les retrouvailles sont superbes mais… elles seront de courte durée pour moi. Le sort s’acharne : Louise tombe de nouveau malade et mouche, tousse, crache. Privée de promenade avec mes amies, elles viennent à moi  dès mardi et on enchaîne des restaurants le midi et le soir pour débriefer et se raconter nos vies. WhatsApp est un outil extraordinaire qui fait qu’on a rien perdu du fil de nos vies communes. On se retrouve comme si on ne s’était jamais quittés.

Je suis donc de retour chez le médecin qui, devant l’afflux de nos visites (« Rassurez-vousvous n’êtes pas les pires » nous dit la morne secrétaire qui m’accueille toujours avec le même regard vide) finit par diagnostiquer une allergie probable. On aura droit au même rituel habituel : machine pour respirer, truc à pshiter dans le nez et recommandations d’usage. On passe à la caisse et surprise ou ironie du sort : on nous fait un rabais de 20% parce qu’on est des clients réguliers. On est donc passés de 200 dollars à la première visite, à 148, puis 118, puis 95. A ce train là, on va finir par nous donner de l’argent. On profite des vacances d’ailleurs pour tester une autre pédiatre sur les recommandations de Matthieu. Elle parle français et officie dans ce qu’elle a elle même qualifié de « dispensaire ».  Une clinique communautaire qui, pour aider les populations les plus fragiles financièrement, propose des consultations au prix unique de 110 dollars. Pas de surprise ici, on passe à la caisse avant de voir le docteur. Terminées les suées interminables et les bouffées d’angoisse à chaque fois que le docteur sort un instrument différent pour vérifier oreilles, gorge ou nez. Oui parce que nous avons découvert cela ici : il y a un tarif de base (flou évidemment et pas fixé nationalement, allant dans notre cabinet de 118 à 176 dollars – allez savoir pourquoi), qui est amendé en fonction de ce que fait le médecin. Et c’est la surprise à la fin. Ainsi, si le docteur décide de faire respirer l’enfant 10mn dans une machine pour l’aider à dégager ses poumons, il vous en coutera 150 dollars supplémentaires. S’il lui vérifie les oreilles, c’est 20 dollars et ainsi de suite.  Et c’est comme cela qu’on approche en un battement de cil, les 300 dollars. Bref, le docteur Walters diagnostique également une allergie , en profite pour faire un vaccin, lancer des analyses de sang, regarder les yeux, tester les oreilles, tripatouiller l’enfant pour son check-up des 4 ans. Inutile de vous dire que tout cela aurait coûté plus de 800 dollars dans un cabinet classique. Tiens d’ailleurs… au moment de payer la consultation, la secrétaire me dit que ce sera certainement gratuit pour nous. Puis on fournit mes fiches de paie et nous dit que finalement non malheureusement. Le seuil en dessous duquel on ne paie pas les consultations et de 41.000 dollars par an. Ce qui fait 3400 dollars par mois. 3400 ! Quand les loyers moyens dans le coin sont autour de 2500 à 3000 dollars. C’est ce qui définit ici le seuil de pauvreté et d’un seul coup c’est tout une autre réalité qui nous frappe. Une réalité sourde et méconnue.

Mes amies partent 3 jours visiter Yosemite et Bertrand et Fanny arrivent : l’un de Tahiti et l’une directement de Paris. On commence à planifier nos vacances qui démarrent par un barbecue en bonne et due forme chez Matthieu, dûment arrosé de rhum, de vin et de bière. 

Le lendemain, nous filons tous (presque… Guy rester garder Louise à la maison) assister à une incroyable Messe Gospel dans l’Eglise de Glide, en plein Tenderloin,  quartier le plus défavorisé de la ville. Église affiliée méthodiste plutôt conservatrice dans les années 30, elle va devenir le point de ralliement de la contre-culture dans les années 60. Matthieu nous avait prévenus « Il va falloir être ouvert hein. Ce n’est pas la messe catholique française traditionnelle du tout ». La messe démarre par des chants gospels enivrants. Extatique, le leader du chœur chante sa foi et entraîne le public dans une atmosphère endiablée. Les fidèles reprennent en chœur certains couplets et ponctuent les chants de « Amen » ou de « Yes Lord » tonitruants. D’autres sont venus avec des tambourins qu’ils agitent frénétiquement.

Il y a des blancs, des noirs, des femmes, des hommes, des trans, des SDF, des enfants, des jeunes et des moins jeunes. Tous communiant sous le sigle de la fraternité en une joyeuse euphonie. On s’embrasse et on se sert généreusement dans les bras (version américaine du « baiser de la paix »), on se donne régulièrement la main. Une femme prend la conduite du chœur et embrase littéralement les cœurs et les esprits avec sa voix à la pureté divine. On ne reste pas insensible. Les larmes coulent tandis que la messe du jour est consacrée à un sujet qui nous tient tous à cœur, surtout ici. Qui me tient à cœur. L’histoire de la communauté noire aux Etats-Unis depuis l’abolition de l’esclavage en 1865. Un film émouvant fort et violent à la fois retrace le parcours de ces hommes et femmes dont l’Histoire,  pour l’immense majorité, a malgré elle englouti à jamais les noms. Des droits après l’abolition, puis des privations, les Jim Crow Laws, la naissance du Klan et les lynchages. Les aquarelles très poétiques qui sont projetées sur l’écran géant dépeignent des arbres puis de sinistres silhouettes d’âmes perdues et pendues aux branches. La poésie tourne au cauchemar et, savamment esquissées, les aquarelles nous entrainent malgré nous dans la terreur de la ségrégation et son déchainement de violence. Le révérend prend la parole puis d’autres membres de la communauté. Tout est incroyablement émouvant. Il est question de bénir un voyage de certains d’entre eux à destination de Montgomery, Alabama, haut lieu de la contestation pour les droits civiques. Là, sur un ancien marché où jadis on vendait les Noirs comme des bêtes, vient de s’ouvrir un Musée-Mémorial exceptionnel, presque unique dédié à l’esclavage et aux lynchages. Le musée titre  » Pour ceux qui ont été pendus, battus. Pour ceux qui ont été abattus, noyés, brûlés. Pour ceux qui ont été torturés, tourmentés, terrorisés. Pour ceux qui ont été abandonnés par la loi. Nous nous souviendrons« . Nous irons un jour peut-être. Qui sait.

Changement de décor. L’après midi est consacrée à tout autre chose. On entraine tout le monde dans le Castro (où des gens se promènent encore nus…), le quartier Gay historique de San Francisco. Vous vous souvenez du Sing-A-long La petite sirène qui nous avait follement amusé ? Et bien cette-fois ci, nous partons pour un Sing-A-Long Grease ! A nous les couronnes, les petites bulles et les rythmes endiablés des années 60. On suit Danny, Sandy, Rizzo, Kenickie et tous les autres dans les intrigues amoureuses du lycée Rydell.

 

On s’époumone surtout sur Summer Nights, Sandra Dee, You’re the one that I want et comme pour la petite Sirène, on balance des pétards, on fait des bulles. Bref. Autant vous dire qu’on s’est amusés. Et pas qu’un peu. Certain(e)s d’entre nous connaissent les répliques au mot près. Incroyable ! Un fantastique exutoire après la matinée chargée que nous avons eue.

On partage un dernier repas au bord du Pacifique puis il est déjà temps de dire au revoir aux filles. Le temps est passé à une vitesse incroyable et a été tinté de frustration pour ma part. J’aurais tellement aimé partager plus avec elles.

Il reste 4 jours à passer avec Bertrand et Fanny avant que ceux-ci ne retournent se perdre dans le Pacifique. Guy prend quelques jours et la joyeuse troupe se balade à Kirby Cove, dans le Financial District ou encore à Muir Woods.

Une dernière découverte pour nous sera le Flea Market (littéralement marché aux puces) de Treasure Island. Un marché aux puces assez réputé qui se tient une fois par mois. Le long du rivage, avec vue sur Oakland, des centaines de petites cabanes blanches alignent artisans, food-trucks  et petits commerçants indépendants. On déambule tranquillement au milieu des chiens et des badauds et on s’arrête devant les curiosités. Tas de vinyles, jouets vintage, vieilles cartes des Etats-Unis, objets artisanaux de tous poils, ferronnerie…

Une petite bulle temporelle rassérénante bercée par les groupes de musique qui se produisent ça et là, les sourires des uns et des autres et l’ambiance festival qui flotte dans l’air. Le temps n’était pas prodigieusement de la partie mais l’adorable bouille de Louise (je suis hyper objective) lui a fait gagner un joli bracelet artisanal (la dame l’a produit trop petit et savait qu’elle ne le vendrait pas, elle a choisi Louise au hasard dans la foule passante), on mange quand même des glaces et je me trouve un super t-shirt estampillé du mot préféré de notre petite blonde : NOPE* (* littéralement « non » dans un registre plutôt familier).

Oh, j’allais oublier (en fait non). C’est que Louise a eu 4 ans. Pour l’occasion, couverte de cadeaux en provenance de France,  elle a eu le droit a un gâteau licorne fait maison et tout un tas de bisous en attendant la fête avec quelques copines…

On vous souhaite une bonne semaine et on vous dit à très vite pour la suite des aventures,

C, G, L

Avec l’aimable participation de Jojo, Marie-Hélène, Anne-Gaëlle, Corinne, Matthieu, Marie, Bertrand et Fanny. 

8 thoughts on “RetrouvailleS

  1. Trop émue de faire partie du post cette fois ci ! Que de beaux souvenirs ! Quel magnifique séjour à SF… merci à vous les amis pour votre accueil! ❤💙💛💜

  2. Hello Céline, tu sais que je te lis régulièrement, même si je n’écris pas… Mais la, occasion spéciale, bon anniv à ta louloute !
    Et le gato licorne, tu as la recette ? Parce que j’en connais 2, de 6 et 11 ans (!!!) à qui ça plairait.
    Plein de bises. Anne laure

  3. Salut Célinoux,

    Quel chouette récit avec les copains de Serris. En force Emilie du Châtelet à SF. Petite Louise devient grande, grande… Embrasse la de ma part, et bon courage à toi, hein! B
    Bises
    Ton ex collègue morue Cesbron

  4. Les gens ont une drôle habitude vestimentaire dis donc !

    En tout cas, ça fait plaisir d’avoir des nouvelles, je me demandais ce qui se passait au pays du chauve milliardaire :p

    Ah et joyeux anniversaire Louise ! :^)

  5. Euh… j’ai comme qui dirait une demande TRES TRES TRES forte de deux petites filles pour ce gâteau « Licorne »… Ouffffff j’ai encore 5 mois pour me préparer!
    Dis, est-ce que tu aurais la recette???? :p

    On vous embrasse bien fort!
    Des bisous depuis un pays où il fait 4° à 16h45 un 30 avril…. Oh un pingouin dans le jardin!

  6. Hello Céline! contente de te retrouver. Vous respirez la joie de vivre.
    Il ne faut pas être malade à San Francisco!
    Joyeux anniversaire LOUISE et bravo pour le gâteau
    Gros bisous et bon courage pour la suite

  7. mais lol le gâteau licorne de ouf ! ça peut se faire pour des …….37 ans ????????? (trempé dans le rhum avec une corne en ROCHER SUCHARD ?)

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