Jean-Luc Coatelem, Nouilles froides à Pyongyang, 2013.

« Je fais dix mètres en Corée du Nord. Et c’est de nouveau un grand silence comme si on entrait dans une poche vide, une tâche aveugle » (Jean-Luc Coatelem, Nouilles froides à Pyongyang, p. 26)

Un silence. La sensation d’un glacial effroi.

Je referme le livre et le récit de ce voyage ne pèse déjà plus sur mes épaules.

Nouilles froides à Pyongyang est un récit de voyage étrange, décalé. De ces récits qu’on veut absolument lire, et puis que l’on regrettera presque d’avoir parcouru. En réalité, il m’aura surtout donné envie d’aller voir par moi-même de quoi Pyongyang est fait. Le récit de Coatelem est superbe de simplicité.

Le voyage en Corée du Nord n’a rien d’un voyage : de l’entrée sur le territoire de la DPRK (Democratic’s People Republic of Korea) à sa sortie, tout est prévu, au millimètre. Les guides, les visites, les cameramen, les rencontres, les discours. Chaque mot est pesé et on suit avec un intérêt renouvelé à chaque page, l’avancée de Coatelem dans ce pays si fermé. Pas après pas, page après page, on navigue entre contradictions, absurdités, incohérence. L’auteur étouffe très vite et tente assez rapidement d’aller à l’encontre des ordres, des incitations à prendre des photos de « ça et pas ça », il pose des questions gênantes, laisse traîner un livre « subversif ». Il y met les formes tout de même, ne voulant pas rester quelques mois supplémentaires pour subir le questionnement des sbires du gouvernement. Le tout est raconté sur un ton assez drôle où se mêlent l’humour, la mélancolie parfois, la lucidité très souvent.

Ce qu’il raconte est souvent incroyable, et on se plaît à aller d’aberrations en illogismes : visites de fermes modèles, visite de cinémas, propagande, récits improbables… Au centre du voyage et de toutes les attentions, des acteurs incontournables : les Kim. Et puis il y a ce plat, longtemps promis : les célèbres nouilles froides de Pyongyang…

Un récit à lire sans retenue qui ne nous apprend rien sur le pays tout en étant très éloquent. Un appel au voyage ? En tout cas, il a attisé notre curiosité et nous aura mené nous aussi, sur les pavés de Pyongyang…

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